La Cuisine et la créativité d'abord...

Tout d'abord merci de visiter ces quelques pages... En vous souhaitant une bonne lecture pour essayer de comprendre se qui se cache derrière la passion du goût...

 

Comment devenir créatif en cuisine.

 

Tous les chefs vous le diront : la créativité en cuisine est autant une affaire de travail que d’imagination.
Ils vous diront également qu’il n’y a pas de recette pour créer des recettes, seulement des méthodes : entraînement à l’imagination, organisation du travail, règles de composition esthétique, règles de communication.

 

Etre créatif en cuisine, ce n’est pas seulement proposer des recettes qui étonnent par leurs qualités gustatives et leur présentation. C’est les concevoir de façon à ce qu’elles soient réalisables dans un cadre ordinaire - le restaurant pour un cuisinier professionnel. Et c’est aussi obtenir pour ces recettes l’approbation durable des convives.
Autrement dit, être créatif en cuisine équivaut d’abord à savoir la faire. Car, d’une recette qui n’étonnerait pas, qui ne plairait pas et qui serait irréalisable, on dirait qu’elle est tout simplement mauvaise. On peut maîtriser parfaitement tous les arts culinaires et faire une cuisine sans invention et que finalement les convives trouveront sans goût.
Tout cuisinier se doit d’être créatif, pour chaque repas qu’il prépare... s’il veut avoir des clients pour les repas suivants.

 

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A l'image de ces petites aumonières, craquante, croustillante d'abord puis le fondant et la délicatesse de sa garniture, pleine de mystères. C'est cela aussi l'imagination.

 

Une méthode pour avoir des idées

Elle consiste à associer librement des idées qui, habituellement, sont très éloignées les unes des autres.
Un produit peut être associé à une recette traditionnellement utilisée pour un autre produit : on aura ainsi un pot au feu de comté, un bourguignon de lotte, des frites de pommes.

Ces trouvailles doivent être évidemment goûtées, critiquées, évaluées avant d’être proposées aux clients.
L’association libre est aujourd’hui utilisée dans de nombreux domaines où créer est devenu une nécessité : publicité, mode, politique, stratégie militaire...

 

bretonA l’origine ce fut une technique de création poétique définie par André Breton et le mouvement surréaliste.

 

  Il faut prendre beaucoup sur soi pour vouloir s'établir dans ces régions reculées où tout a d'abord l'air de se passer si mal, à plus forte raison pour vouloir y conduire quelqu'un. Encore n'est-on jamais sûr d'y être tout à fait.
(Extrait du "Manifeste" André Breton ci contre)

 

En cuisine, elle est surtout utile pour lever les inhibitions qui peuvent bloquer l’imagination.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le cuisinier sans complexe pratique l’association libre

Exemple de Dominique Toulousy, le chef des Jardins de l'Opéra à Toulouse.
"J’avais lu dans le journal Ici Paris une recette de nouilles au foie gras avec un peu de truffe hachée".
Quelle est la différence entre la recette - les ravioli de foie gras et aux truffes - devenue emblématique de ce chef toulousain et celle proposée au lecteur du journal ?
Remarquons qu’elle n’est pas dans les ingrédients : ce n’est pas le chef qui a eu l’idée d’ajouter du foie gras ni des truffes à un plat de pâtes.
L’invention est ailleurs : les nouilles de la recette originelle sont devenues des ravioli.
Voilà une association d’idées ! Et fameuse celle-là !
En réalité les nouilles au foie gras et au truffes de la recette initiale, ce ne sont que des nouilles et du foie gras et des truffes : deux textures et trois goûts non dissociés.
Dans les ravioli de foie gras aux truffes, on découvre les goûts de façon décalée : d’abord l’arôme truffé de la sauce qui nappe les raviolis, puis le goût de la pâte à nouilles lorsque l’on croque le ravioli et, sublime, quand le ravioli fond en bouche, c’est le foie gras.
La voilà la fameuse surprise : la découverte de ce que l’on déguste vient en trois temps.
Et quand une recette est au point, elle n’est pas pour autant figée.
Un chef sait que lorsqu’il associe des saveurs, des couleurs, des textures, même s’il l’a déjà fait cent fois, il réinvente chaque fois la recette.
Car, pour lui la recette ne préexiste jamais à sa réalisation, elle se réinvente selon l’inspiration du moment ; "Contrairement à la pâtisserie, dit Dominique Toulousy, on ne pèse pratiquement rien en cuisine. On travaille à l’estime".

 

Un chef sait aussi que lorsqu’il imite une recette ancienne ou exotique, il ne copie pas, il la renouvelle.

L’idée de son carpaccio de homard, le chef des Jardins de l’Opéra l’a trouvée au Japon : "Cette consistance du crustacé cru m’a intéressé. Les Japonais servent ça avec de la sauce soja et de la moutarde verte".
Voilà le point où l’invention se produit.
Certes, les Japonais ont leur goût mais le chef français estime qu’une cuisine ne peut s’apprécier pleinement que dans le pays d’origine.
Pour accompagner un carpaccio de homard à servir à Toulouse, il choisit alors une saveur marine complémentaire : la vinaigrette au corail d’oursin, faite à l’huile de noisette pour une connotation de goûts appréciés par la clientèle française.

 

Organiser toute création point pas point

Pour réaliser une idée créative, la méthode n’est plus de l’ordre du jeu mais de l’analyse rationnelle.
Il s’agit de définir tous les points de la recette.
Sur le plan gustatif, on choisit la façon dont on souhaite associer entre eux les arômes, mais aussi les textures entre elles et les températures entre elles.
Sur le plan des traitements culinaires, on définit chaque geste à accomplir pour chaque élément de la recette.
Autrement dit, pour être créatif, il faut beaucoup de travail.
Dominique Toulousy : "La créativité impose de ne jamais abréger le travail. Il faut du temps pour obtenir la puissance, le goût, l’identité propre à la cuisine française qui est celle que je veux faire".
Voilà pourquoi, un chef de son niveau travaille 14 à 15 h par jour.
Voilà pourquoi il doit employer une dizaine de personnes en cuisine pour une soixantaine de couverts, soit une personne au travail pour 6 clients.

 

Voilà pourquoi surtout, il insiste tellement sur la formation.
La sienne, juge-t-il, à duré de longues années ; commençant dès l’âge de 13 ans avec des stages d’été, continuant par le passage obligé à l’école hôtelière, se perfectionnant dans divers postes de cuisinier.
C’est seulement à l’âge adulte, alors qu’il travaillait pour un prestigieux chef bourguignon qu’il a su enfin "ce qu’il voulait faire" : chef, c’est-à-dire créatif ou plutôt créateur.
A l’égard de ses collaborateurs, Dominique Toulousy se veut (presque) aussi exigeant qu’avec lui-même : il les forme à la créativité et y réussit bien puisque déjà trois de ses anciens seconds sont devenus étoilés.
D’autres chefs peuvent avoir un langage différent, insister sur l’inspiration, l’improvisation, la "magie" du talent.
Mais ne nous y trompons pas : derrière ce genre de discours scintillant, il y a la part toujours énorme du labeur, et en l’occurrence, le travail n’a de sens que s’il libère l’esprit créatif.

Il en est de même pour la culture.
A consulter la littérature culinaire de tous les pays et de toutes les époques, on peut avoir l’impression que "l’on n’invente jamais rien". Sauf qu’il faut tout réinventer.
Et l’on constate même que les réinventions sont souvent mieux réussies que les inventions.

 

Une assiette, comme une image, comme un bouquet, est une composition

On peut comparer l’assiette à une annonce publicitaire, à ceci près qu’on finit par manger la première et par oublier la seconde.
Il y a un visuel (l’aliment), une accroche (le nom de la recette), un texte (les commentaires que le chef ou le chef de salle font au client) : la créativité est requise tant pour l’image que pour le texte. Pour présenter une recette de façon créative, le chef suit une méthode en tous point analogue à celle du graphiste, qui est aussi celle du fleuriste ou du créateur de vêtements.
Une assiette, comme une image, un bouquet ou une robe, est une composition de volumes, de formes et de couleurs.

Le cuisiner assemble les éléments selon son goût artistique et ses références.
Il cherche l’équilibre de toutes les parties ou au contraire "l’accident visuel", la simplicité ou l’artifice, l’élégance stricte ou l’humour.

 

Dominique Toulousy, lui, aime ce qui est "net, clair, précis"... "Je crée d’abord la recette. Si je la juge bonne, j’essaie de concevoir une décoration en utilisant les ingrédients eux-mêmes, uniquement les ingrédients". C’est son esthétique personnelle, et il suffit de regarder les photographies de ses créations pour en saisir l’efficacité.
Imaginer le design d’une présentation, trouver un nom de recette, parler de la cuisine ce sont les étapes d’une même démarche globale de communication.
Si le plaisir des yeux anticipe celui de la bouche, la poésie des mots met également le mangeur en appétit et le rassure sur ses choix.
Si l’on veut aller jusqu’au bout de la démarche, impossible de ne pas communiquer.

 

Présenter ses idées, les vendre = communiquer

Pour parler de ses idées, le chef n’est pas forcément le mieux placé car il ne peut en dire trop de bien sans risquer de paraître vaniteux. C’est bien ce dont parle Dominique Toulousy quand il avoue que "son goût" n’est pas d’aller parler aux clients.
Il y va cependant, quand son épouse, responsable de la salle, le lui demande. Il sait que de toutes façons, elle le représente, en excellente "gastronome"qu’elle est.
"Les clients perçoivent bien notre complémentarité" se félicite-t-il. Voilà un homme heureux.
Mais alors, quel conseil donner, quel discours tenir pour "vendre sa cuisine" ?
En d’autres termes : existe-t-il un discours spécifiquement commercial en cuisine ?
Un discours que l’on pourrait apprendre par cœur dans un manuel ?
Non bien sûr : pour bien vendre sa cuisine il suffit de savoir en parler en gastronome, connaissant les produits, racontant ses découvertes, et mettant des mots sur les sensations gustatives expérimentées par les convives.
D’où l’intérêt de se cultiver, d’être amateur de bouquins, et… d’avoir pratiqué l’analyse sensorielle, ou à tout le moins, des exercices de dégustation comparée.

 

 

 

 

 

Cet article a été rédiger grâce à l'expérience précieuse de Dominique Toulousy raconter sur son blog à l'adresse suivantes : link vous pourrez y retrouver des recettes mais également des astuces et vidéo de maître.

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